C'est qui c'est qui, mais c'est Bebe et Louis Barron*, compositeurs électroacoustiques. La révolution de la musique dans la science fiction. Tout est permis tout est permis* ! Planète Interdite* ou l'invention sans limites et la première bande-son totalement laserifiée par l'électronique.
Le film entier est ici, pas longtemps.
Afin de produire et composer notre musique, nous avions conçu toute
une série de circuits électroniques, inspirés par les recherches du
mathématicien Norbert Wiener sur la cybernétique. Ces circuits
produisaient une activité sonore infinie, amplifiée puis enregistrée sur
magnétophone, que l’on travaillait par la suite grâce à un patient
labeur de montage et de manipulation de la bande magnétique. Nous
travaillions alors en symbiose avec nos machines, nous ne faisions qu’un
avec ces circuits comme un quatuor à cordes faisant corps avec ses
instruments. Mais ce qui était fascinant, c’était que les sons générés
par ces circuits conçus à partir d’équations mathématiques, semblaient
posséder une vie propre. Nous n’avions aucun contrôle véritable sur leur
genèse. Nous utilisions de façon telle quelle, le déploiement, la
floraison de timbres et de sons obtenus par ce principe technique. Les
théories de l’information, le concept d’entropie, les motifs du hasard
et de la probabilité, étaient les seules règles avec lesquelles nous
pouvions jouer pour tenter d’en contrôler la forme. Les émotions qui
semblaient émerger de ces circuits, possédaient un caractère à la fois
charmeur et monstrueux, qui n’était pas sans évoquer l’idée du voyage
spatio-temporel. C’était quelque chose de très fort et de totalement
fascinant. Chaque circuit que nous avions construit possédaient ainsi sa
propre vie, son propre rendu, son propre caractère. Une fois que ces
sons étaient morts, qu’ils avaient disparu, nous étions incapables de
les reproduire à l’identique. Nous ne pouvions et ne voulions rien
contrôler d’ailleurs. Nous expérimentions avec une forme d’innocence et
d’émerveillement mêlés. Une fois les circuits construits, nous nous
asseyions et nous assistions, bouche bée, à leur naissance. Nous étions
dans un état particulièrement réceptif, éveillé, à l’image d’un enfant
faisant ses premiers pas dans le monde, les oreilles et les yeux grand
ouverts. Par la suite, grâce à son impact, cette bande originale a posé
les bases de nombreux autres films de science-fiction. Je me souviens
qu’une journaliste de Vogue avait évoqué à quel point cette musique
semblait correspondre au son de ses propres rêves. Elle avait sans doute
trouvé là, dans ces sons électroniques, comme beaucoup d’autres
spectateurs du film, une forme d’universalité.
Bebe Barron.
... et pour ce qui est du sens on ne peut qu'y voir l'analogie* avec Goya, non ?
Le sommeil de la raison engendre des monstres*
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