Le premier baiser à chaque fois reste. Le coup héliotrope.

 toute première photographie - Point de vue pris de la fenêtre à Saint-Loup-de-Varennes - Nicéphore Niepce, 1827

(plaque d’étain recouverte de bitume de Judée, ou asphalte, sorte de goudron naturel tiré du sous-sol et qui durcit quand il est exposé à la lumière, les parties non impressionnés sont ensuite enlevées avec de l'huile de lavande qui les dissous)

 

Qu'il soit de lumière ou de chair, c'est lui qui dessine la couleur de ce qui va subsister au creux de la mémoire. La marque, l'émotion indélébile des instants uniques qui ouvrent tous les possibles. Le corps comme la photographie marchent à l'héliographie, par l'écriture du soleil, à coup de sensation inattendu et de brulure appelée à rester.

Sacré Nicéphore ! Les gris épicés, les ombres, les noirs, les blancs cramés, et cet observatoire d'un coin de chambre de Bourgogne près de Chalon-sur-Saône, comme un pendant de ce que l'on voudrait transfigurer. Le présent transformé en passé, posé là sur du papier ou du verre, histoire d'en faire toute une histoire. C'est le début du souvenir. On part du phénomène pour en déployer tous les inouïs.

Mais que reste t-il ? 

Ce que l'on aimerait emporter et le restant dissous pour mieux préserver le détail d'un baiser ou de ce grand trait de lumière venu frapper. Un vestige vivant aux émotions différentes, une photographie d'un moment et l'invention d'un nouveau présent.