On ne le sait pas toujours, mais les plaisirs naissent aussi discrètement dans les recoins sombres et isolés. Bricolages furtifs aux souffles courts, instrument tout sorti et sensation mystique.
Ça décoiffe les musiciens de devoir ainsi se fondre dans les états extatiques à force d'abandon et de répétition. Le travail secret, de la base au bout du tuyau, tout un art de l'exploration des possibilités et des idées tactiles.
Note après note, crescendo et retenues, attentions et obsessions d'un moment, les inventions qui coulissent et le son qui siffle.
Drôle de passion et de langue, mais comment ne pas en être totalement épris lorsque l'on sait que blotti au creux de ses effets, l'acoustique se dresse et se fabrique sans limites.
Encore encore encore, et inlassablement refait, un art de le redite, un bouche à bec aux saveurs uniques, un job job job avant le feux d'artifice que l'on se prépare à gouter.
Travailler, explorer, tâter l'inconnu et prendre le temps d'essayer, se laisser aller et ne pas sombrer, attendre une liberté, et la crudité d'une magie aux allures dépouillées, admirer et caresser les regards aux yeux fermés, écouter le détail d'une tringlerie ou le cliquetis que font les clefs - on dirait le bruit des bagues à l'âme - constater les retards et les résistances, la dureté de ce geste ou l'impalpable douceur au moment de se refermer, attendre le mystère qui pousse au vice des arythmies et des dissonances savourées.
C'est un état temporaire que l'on aimerait tant faire durer. Hypnotisés par l'invraisemblable galanterie des lèvres et de la anche, subjugué et bercé par le bel air joué, estomaqué d'autant de contrastes confrontés.
Le sax est une affaire parfois de combine, un va et vient entre le possible et l'imaginé, entre l'utopie et la réalité, un fantasme entre une gamme rêvée et un son réalisé, qui d'un coup fait tout décoller.
Blow blow blow... le petit bonheur.
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