mercredi 13 novembre 2013

Sonore et vivant.




La très chère était nue, et, connaissant mon cœur,
Elle n'avait gardé que ses bijoux sonores,
Dont le riche attirail lui donnait l'air vainqueur
Qu'ont dans leurs jours heureux les esclaves des Mores.

Quand il jette en dansant son bruit vif et moqueur,
Ce monde rayonnant de métal et de pierre
Me ravit en extase, et j'aime à la fureur
Les choses où le son se mêle à la lumière.

Elle était donc couchée et se laissait aimer,
Et du haut du divan elle souriait d'aise
À mon amour profond et doux comme la mer,
Qui vers elle montait comme vers sa falaise.

Les yeux fixés sur moi, comme un tigre dompté,
D'un air vague et rêveur elle essayait des poses,
Et la candeur unie à la lubricité
Donnait un charme neuf à ses métamorphoses;

Et son bras et sa jambe, et sa cuisse et ses reins,
Polis comme de l'huile, onduleux comme un cygne,
Passaient devant mes yeux clairvoyants et sereins;
Et son ventre et ses seins, ces grappes de ma vigne,

S'avançaient, plus câlins que les Anges du mal,
Pour troubler le repos où mon âme était mise,
Et pour la déranger du rocher de cristal
Où, calme et solitaire, elle s'était assise.

Je croyais voir unis par un nouveau dessin
Les hanches de l'Antiope au buste d'un imberbe,
Tant sa taille faisait ressortir son bassin.
Sur ce teint fauve et brun, le fard était superbe!

— Et la lampe s'étant résignée à mourir,
Comme le foyer seul illuminait la chambre
Chaque fois qu'il poussait un flamboyant soupir,
Il inondait de sang cette peau couleur d'ambre ! 


Pourquoi y revenir si ce n'est pour le plaisir, comme une chansonnette ou un pari sur l'avenir. Des mots qui séduisent comme un regard qui emballe ou un souvenir qui se faufile et s'immisce dans les esprits au gré des circonvolutions d'un parfum qui s’éloigne. Il y a de la poésie comme des réminiscences, des sons comme des vielles mémoires, des odeurs comme une inscription et des touchers au gout d'ailleurs, les voilà les éternités d'une vie à aimer, vestiges vivants qui se sont constitués. De belles colonnes de sensations élancées et des voutes inimaginables et intimes traversant les sentiments et les espoirs d'un moment. C'est un continent. Une histoire submergée mais aux allures splendides et encore inventives. 


A la nue accablante tu
Basse de basalte et de laves
A même les échos esclaves
Par une trompe sans vertu

Quel sépulcral naufrage (tu
Le sais, écume, mais y baves)
Suprême une entre les épaves
Abolit le mât dévêtu

Ou cela que furibond faute
De quelque perdition haute
Tout l'abîme vain éployé

Dans le si blanc cheveu qui traîne
Avarement aura noyé
Le flanc enfant d'une sirène.


Bien sur le temps est venu aussi déposer ses minutes de passages et ses durées aux larmes, mais au son de ces mots existe une infinie volonté de continuer. Quelque chose pour ne pas le nommer qui résiste et grandit encore oui on peut le dire. Ce sont des émotions chaudes et luisantes qui vont nous accompagner...


Une dentelle s'abolit
Dans le doute du Jeu suprême
A n'entrouvrir comme un blasphème
Qu'absence éternelle de lit.

Cet unanime blanc conflit
D'une guirlande avec la même,
Enfui contre la vitre blême
Flotte plus qu'il n'ensevelit.

Mais chez qui du rêve se dore
Tristement dort une mandore
Au creux néant musicien

Telle que vers quelque fenêtre
Selon nul ventre que le sien,
Filial on aurait pu naître.



En être fou comme en être amoureux, nu et tombé, sans autre envie que de se laisser happer frôler ou désirer. L'état des corps offerts aux inconnues merveilles.


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